Un sonar espionne les poissons du Rhône

Un poisson qui quitte le lac Léman pour descendre le Rhône va devoir franchir plusieurs barrages. 

Le barrage de Verbois constitue une chute d'eau importante pour faire tourner des turbines génératrices d'électricité renouvelable. Mais l'Arve lui amène des masses de sédiments qu'elle charrie depuis le massif du Mont-Blanc et qui s'accumulent dangereusement avec les années. Il faut évacuer régulièrement ces sédiments pour éviter une hausse du niveau d'eau qui pourrait créer des inondations. Depuis les années 1940, la technique a consisté à abaisser complètement les eaux de la retenue du barrage: le fort courant créé par cette vidange emporte les sédiments... Mais ce procédé brutal nuit fortement aux poissons, ainsi qu'à toute la faune et la flore concernées. Ainsi, pour protéger la biodiversité du Haut-Rhône, les exploitants français et suisses de ces cinq barrages se sont entendus pour appliquer, tous les 4 ans, de nouvelles pratiques d'abaissements partiels des eaux.

Etat d'avancement du projet

Des sonars pour "voir" les poissons

Pour évaluer les effets de ces nouvelles pratiques sur les poissons, il faut avoir une bonne idée des populations présentes et de la variation des effectifs au cours de l'année. Voilà pourquoi une équipe de chercheurs de l'HEPIA (Haute Ecole du Paysage, d’Ingénierie et d’Architecture), de SpyGen et de la CNR (Compagnie Nationale du Rhône) s'embarque à la nuit tombée dans un bateau muni de deux sonars à ultrasons, afin de sonder les eaux entre les barrages. Pourquoi la nuit? Parce que c'est le moment où les bancs de poissons se dispersent et où les individus remontent du fonds vers la surface... Sur les images reconstruites d'après les échos des sonars, les poissons se distinguent individuellement, et on peut même avoir une idée de leur taille. Mais il est impossible de connaître l'espèce. Alors les chercheurs appliquent une seconde technique digne de la police scientifique: l'analyse de l'ADN environnemental.

Identifier les poissons dans la soupe d'ADN

Tout au long de leur navigation, les chercheurs filtrent l'eau pour récolter une «soupe» d'ADN: les traces génétiques des êtres vivants du Rhône. Dans cette soupe, ils identifient les portions d'ADN excrétées par les poissons, puis parviennent à déterminer à quelles espèces elles appartiennent. En effet, un poisson perd constamment du matériel cellulaire par son urine, ses déjections, la production de mucus ou la perte d'écailles.

Les résultats du projet

À ce jour, 12 campagnes ont déjà été effectuées, chacune représentant quatre soirées de navigation sur les quatre retenues d’eau. Mais il reste les deux plus importantes à mener: la campagne juste avant, et la campagne juste après l'abaissement partiel des eaux pour cette nouvelle gestion des sédiments plus respectueuse de la biodiversité. 

Où se situe le projet